Luc Goossens, nouveau
Directeur général de Laborelec
La plupart d’entre nous le connaissent pour son précédent poste, à la tête des programmes de recherche d’ENGIE Research & Innovation. Mais avec une carrière de 30 ans dans le secteur de l’énergie chez Tractebel, Electrabel et ENGIE, Luc Goossens possède également une grande expérience dans la conception, le développement et la gestion de projets énergétiques et dans la préparation d’investissements; dans les énergies renouvelables mais également dans le nucléaire, les réseaux et les centrales thermiques.
En dehors du travail, Luc apprécie le sport et la culture, et écoute de la musique sans modération, mais il précise :
Mes goûts sont très variés, mais il y a une constante : ça ne peut jamais être trop conventionnel !
Bonjour Luc, ce vendredi 1er mars, en devenant le nouveau CEO de Laborelec, tu relèves un défi professionnel qui va impacter le quotidien de près de 400 collègues. Permets-moi d’aller droit au but : qu’est ce que ce défi t’inspire ?
C’est sans aucun doute le métier de mes rêves ! Je connais Laborelec depuis longtemps déjà et j’ai régulièrement travaillé avec ses experts dans des postes antérieurs. Mon nouveau rôle me donne désormais l’opportunité de découvrir l’entreprise de l’intérieur et de contribuer activement à son développement. C’est une perspective très inspirante, en particulier dans la période charnière que nous traversons.
L’époque que nous vivons est-elle si particulière ? Est-ce que chaque période de l’histoire n’apporte pas son lot d’évolutions ?
Certes, si l’on regarde les derniers siècles par exemple, on constate que les révolutions techniques ont été le moteur de l’évolution de la société vers une plus grande prospérité et une plus grande espérance de vie. Pensez à la machine à vapeur, à l’électricité, aux ordinateurs, etc. Chacune de ces avancées technologiques comportait des défis qui ont dû être résolus. L’énergie étant au cœur de ces évolutions, notre défi consiste à présent à assurer l’avenir de notre planète. Notre époque s’y attache en réalisant une profonde transition énergétique. Pour un centre d’expertise et de recherche comme Laborelec, c’est une opportunité phénoménale d’apporter une contribution tangible, car les technologies de l’énergie sont notre cœur de métier ! Tout le monde n’a pas cette chance, et le défi auquel nous sommes confrontés est sans précédent.
Après 30 ans dans « le secteur », est-ce que certaines tendances te frappent ? Ou bien le secteur électrique est-il un long fleuve tranquille ?
Auparavant, l’énergie provenait d’un nombre limité de sources telles que le bois, le charbon, le gaz, etc… Ces 50 dernières années, avec le nucléaire, le solaire, l’éolien, et j’en passe, la liste s’est considérablement allongée. Les flux et applications énergétiques ont également énormément changé. En bref, la complexité de ce gigantesque système a augmenté de façon exponentielle en très peu de temps. Mais encore une fois, c’est une opportunité extraordinaire pour Laborelec : plus la complexité est grande, plus il faut de matière grise… Et de la matière grise, nous en avons beaucoup chez Laborelec.
Après cette première partie consacrée au monde de l‘énergie et à Laborelec, on peut peut-être en venir à toi ?
Volontiers, shoot 😊
Tu évoquais tout à l’heure le fait que tu as eu un passé professionnel avant les programmes de recherche d’ENGIE, est-ce que tu peux nous l’esquisser ?
J’ai commencé ma carrière dans une fonction très hands-on, chez Tractebel, dans un département peuplé de … géomètres. En 1993, nos activités quotidiennes consistaient à réaliser des relevés et à tracer des plans, et nos outils portaient des noms presque oubliés aujourd’hui, comme « Rotring » ou « table à dessin ». Mais la digitalisation était déjà dans l’air. C’est précisément ce qui m’a donné l’occasion de faire un saut vers les énergies renouvelables.
Ah bon, comment ça ?
A l’époque, Tractebel commençait à s’intéresser à l’éolien. Le besoin s’est rapidement fait sentir de disposer d’une sorte de cartographie des endroits les plus propices en Belgique. Nous avions dans les cartons du département Topographie, pas mal de données à ce sujet. Avec un peu de créativité, nous avons pu commencer à digitaliser le tout, et c’est à ce moment de ma carrière que j’ai eu le plaisir de développer le premier atlas éolien de la Belgique.
Et ensuite ?
Avec la montée en puissance du renouvelable, les liens avec Electrabel se sont vite intensifiés au niveau éolien. L’opportunité s’est présentée pour moi de faire un saut vers une fonction qui allait m’occuper quasiment 6 ans et qui consistait à développer l’éolien pour le Groupe, GDF-Suez à l’époque. C’est ainsi que je suis devenu en quelque sorte un « apôtre du renouvelable » (rires), prêchant la bonne parole et cherchant avec mon équipe à faire germer les projets dans différents pays où le Groupe était présent.
Si l’on se réfère à ton profil LinkedIn, tu as ensuite fait ton entrée dans le monde nucléaire. Après plusieurs années dans le renouvelable, c’était un tournant de carrière assez radical, non ?
C’est exact. Chez Tractebel, le management de l’époque souhaitait donner un nouveau souffle aux activités nucléaires, revoir les coûts à la baisse et remettre le client au centre des préoccupations. J’ai accepté le défi. Très peu de temps après, en mars 2011, eut lieu l’accident de Fukushima, qui obligea les exploitants nucléaires à travers le monde à faire face à de nombreux défis techniques. Très rapidement, le département nucléaire de Tractebel s’est retrouvé inondé de demandes.
Pour couronner le tout, un autre dossier complexe s’est ouvert peu de temps après : celui des fameux « hydrogen flakes » dans les cuves des réacteurs de Tihange 2 et Doel 3. Toute l’équipe a travaillé d’arrache-pied pour mener les investigations à un rythme effréné, car Electrabel n’avait bien entendu pas une semaine à perdre. C’était une époque captivante, et de collaboration intense avec les laboratoires de Laborelec. On m’a un peu taquiné à l’époque car pendant mon passage à la tête du département engineering nucléaire de Tractebel, Electrabel est passé de 7 unités en exploitation en 2011 … à seulement 2 quand j’ai quitté fin 2014. Mais je ne sais pas s’il y a un lien avec moi.
(rires)
Ceci dit, je suis très fier et heureux de voir que le nucléaire bénéficie à nouveau de la reconnaissance qu’il mérite pour contribuer à la transition énergétique !
Au terme ce chapitre nucléaire, tu es repassé en 2015 du côté des renouvelables, chez ENGIE Métier Centralized Generation cette fois, en charge du développement des projets éoliens, hydroélectriques et géothermiques, c’est correct ?
Oui. Au sein de Métier, mon équipe et moi aidions les Business Units du groupe ENGIE dans différents pays à mettre en œuvre la stratégie du Groupe sur les projets de production d’électricité durable. Les experts de l’équipe fournissaient aux BUs une vision, des connaissances et des solutions globales pour tous les projets d’énergie éolienne terrestre et offshore, d’énergie hydroélectrique, d’énergie marine et de production d’énergie géothermique.
Nous avons introduit, entre autres, des lignes directrices pour l’analyse de rentabilité de projets d’investissements renouvelables, précisant les paramètres techniques et financiers à prendre en compte.
Et ensuite est arrivé le plan de réorganisation Calista, qui a permis ton passage vers ENGIE Research.
Juste. C’est la fonction au travers de laquelle de nombreux collègues Laborelec me connaissent je pense, dans laquelle j’étais en charge de la coordination, du pilotage et de la stratégie en matière de Recherche et Technologie. Tout un programme … mais çà, c’est un chapitre que vous connaissez déjà.
On a pas mal parlé des aspects professionnels, mais peut-être souhaites-tu aussi nous en dire un peu plus au sujet de Luc Goossens en dehors du bureau ?
Avec plaisir. Je suis marié et papa de trois enfants. Nous vivons dans la région de Louvain… mais Ostende se trouve régulièrement sur notre route ; j’aime bien le côté « brut » de cette ville. Pendant mon temps libre, j’écoute beaucoup de musique. J’ai des goûts assez vastes, mais il y a une constante : ça ne doit jamais être trop conventionnel. Ma famille et moi aimons voyager et j’ai un faible pour le Japon, un pays à la culture magnifique, où la communauté prime sur l’individu, et où le respect des personnes et de l’environnement sont des valeurs reconnues.
Enfin, le sport est pour moi source de détente et d’équilibre, notamment la course à pied et le padel. Ma femme et moi récoltons chaque année des fonds à travers les 20 km de Bruxelles pour la lutte contre la mucoviscidose. Cette association aide les patients et leurs familles à améliorer leur quotidien. A titre privé, c’est un thème qui nous tient particulièrement à cœur, ma famille et moi.
Dernière question : nous avions l’habitude d’appeler nos précédents Directeurs “Paul”, “Bart” et “Michaël”… Peut-on conserver cette habitude en t’appelant “Luc”, ou bien “Monsieur Goossens” est-il de rigueur dans tous les cas ?
Bien sûr que non, « Luc » suffira ! Je suis par ailleurs un grand adepte de l’« open door policy » ; ma porte est ouverte à quiconque souhaite exprimer des préoccupations sur l’entreprise ou des propositions constructives.
Interview réalisée par Joël Girboux